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Le livre des attentes

Vous avez tous contracté dans votre vie la maladie la plus douce et la plus redoutable à la fois, la plus sereine et la plus orageuse, l’attente. C’est un virus que vous soignez par des étirements, par un café de distributeur, en discutant, en attrapant un livre ou votre téléphone mobile, mais elle continue sans cesse à augmenter votre fièvre. Vous rougissez, vous ne tenez plus en place, et, soudain, c’est votre tour dans la file, telle ou telle personnes arrive, le match commence. Le virus est finalement vaincu et vous n'êtes que convalescent. Quand reviendra-t-il dans vos veines pour rallumer le feu qui consume le temps ? 

Je suis, comme vous, fréquemment atteint d’attente. Je lis un livre que j’ai apporté ou un magazine qui traîne sur une table ou une brochure publicitaire, je consulte des actualités sur mon téléphone portable, je joue, toujours sur mon smartphone, et, quelques fois j’écoute, j’observe et je note. L’attente devient alors un petit animal de compagnie, tout jeune, tout mignon. J’aimerais qu’il reste auprès de moi plus longuement, que je puisse l'apprivoiser, qu’il me laisse plus de temps de finir d’écrire, de relire et de corriger. Misère, je dois refermer mon calepin.

Vous découvrirez dans ce recueil les petites attentes que j'ai scribouillées en toute hâte, des petites esquisses.

Même jour, plus tard, au Cauva.

Ma fille est avec les médecins légistes pour les prélèvements sur les vêtements, sur le corps et à l'intérieur. C’est trop dur. Les couilles ne sont pas des réservoirs à larmes, mais je pleure.

Même jour, plus tard, au Cauva.

Ma fille est avec les médecins légistes pour les prélèvements sur les vêtements, sur le corps et à l'intérieur. C’est trop dur. Mes couilles ne sont pas des réservoirs à larmes, mais je pleure.

Devant le panneau rue Camille Sauvageau au 47. 15h17. 25/11/24.

Voir la photo (j’ai retrouvé la prise de vue de la rue Andronne en perspective, bien symétrique, le caniveau central court jusqu’au second plan et les immeubles de la rue Camille Sauvageau, je ne sais toujours pas qui est cette Camille et je ne prends pas le temps de regarder sur Google ou Wikipédia)

Je ne vois passer que des gens de dos, ils remontent la rue. Le soir, ils doivent redescendre en même temps que le soleil. Y a-t-il une relation?

Une jeune femme, je le suppose à ses vêtements larges. Son pantalon claque à chaque pas comme un drapeau lourd, en velours épais, dans une tempête. Elle semble déterminée, ses pas sont longs, ses épaules se balancent. Une silhouette à capuche. Un vélo extrêmement mal gonflé peine à avancer dans la petite pente de la rue, les pneus raplaplas des bicyclettes m'énervent, je ne supporte pas, je ne lève pas les bras pour encourager les pédaleux amateurs qui ne respectent pas les chambres à air. Je me réjouis de l'ambiguïté du verbe "supporter". Le sac à dos en matière épaisse imperméable ballote dans l'effort. Il est roulé sur le dessus, au niveau de la fermeture, c'est à la mode, je l'ai déjà remarqué. Une citadine rouge et son chauffeur en sweat blanc, à capuche, passent rue Camille Sauvageau en direction de Sainte-Croix, du conservatoire, du théâtre. Je ne sais pas qui est Camille Sauvageau. La rue est en sens unique, mes références aussi. Une femme, qui me paraît âgée, transporte dans sa main droite un cadre de grande dimension, il touche presque le sol, il est doré. L'homme à capuche repasse et se dirige vers moi. C'est le premier visage de mon attente. Il est presque entièrement couvert par une autre capuche grise.

Des sabots noirs traînent bruyamment sur les pavés.

Pas de chapitre.

Ce recueil est accessible dans son intégralité et sera mis à jour régulièrement. 

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