top of page
De la couleur des corps blessés

De la couleur des corps blessés

Les peuples du monde entier fuient la misère, la guerre et la faim. Camille, l’héroïne de ce premier roman, s’enfuit, elle aussi, non pas devant un conflit, mais face à sa propre honte et aux actes terribles qu’elle a commis sous l’emprise de l’alcool. Sa folie a battu son fils aîné jusqu’aux portes de la mort.

Accompagnée de Jérémy, elle abandonne tout: sa maison, son corps, ses emplois, ses addictions. Ensemble, ils entreprennent un voyage à pied vers Bologne, en Italie. Mais ce périple n’a rien d’initiatique. C’est une mission, un retour au pays, un mélange de vengeance et d’amour.

Ce récit interroge la volonté, le courage, les traumatismes de l'enfance, la mémoire, le temps, vous entraînant dans une lecture où l’on en vient à oublier, peu à peu, les pires tragédies. Camille est un personnage féminin d’une force inouïe, à la fois puissante et terriblement fragile.
 

Logo-ML.webp

Ce roman participe actuellement au concours de Les Murmures Littéraires

Découvrez les premières pages.

Ainsi soit l'exil

Autrefois dieu vénéré, le soleil n’est plus aujourd’hui qu’une pile à rentabiliser. Cet astre déchu, vexé d’être devenu une énergie verte, lui, l’or flamboyant, se réjouit maintenant du malheur des Hommes. Dans l’aube qu’il fait disparaître, ses premiers rayons dansent et scintillent leurs joies sur les larmes d’un enfant, et à l’horizon, ils délavent le bleu du ciel qui désobéit à sa propre couleur. Il est rose, il est pâle, jaunâtre, malade de revenir sur ce monde. 

Les ombres naissent discrètes, grises, longues et douces, à peine dessinées, encore voilées par une brume qui tente de retenir l'obscurité et les rêves que l’enfant n’a pas eus. La nuit, qui ne supporte plus la lumière des Hommes, s’est amusée à le maintenir en éveil entre plaies et rancœurs. Il souffre. Ses larmes coulent, elles sont réelles, chaudes comme la fièvre, épaisses et salées. Elles dégoulinent sur un visage qui ne se ressemble plus, perdu, boursouflé, meurtri, gorgé de sang, irisé du bleu des contusions, mats et sombres dans ce jour qui n'ose pas tout à fait s'imposer sur la face noire de la terre. Le soleil, dans sa démonstration céleste de sa toute-puissance cosmique, révèle peu à peu la silhouette de l’enfant, caché jusqu’alors dans le clair-obscur électrique de la porte d’entrée de la maison qui va le recueillir. Sa peau s’éclaircit dans la fantaisie picturale du prisme de la violence, les gouttes de lymphes, blanches, les violets des hématomes, le rouge brun du sang sec, le rouge vif des plaies. C’est l’arc-en-ciel de la douleur. L'enfant souffre, mais ce n’est pas pour cela qu’il pleure. Il regarde sa mère s’éloigner. Elle n’a aucun au revoir pour lui, aucune tendresse, aucun bisou à lui déposer comme souvenir, elle ne veut plus l’approcher. Elle ne peut plus voir les couleurs du mal. Pas de considération. Pas de câlins. Elle s’en va. Elle serre les poings, ferme les yeux, accélère le pas et part. 

L’enfant aimerait courir, la rattraper, se coller à elle et ne pas la quitter, mais on le retient. L’enfant avale ses passions et ses larmes, elles coulent dans sa gorge et noient ses cris. Il ne peut émettre aucun son, aucun gémissement, aucun appel, il est silence, alors ce sont les oiseaux du matin qui chantent son chagrin. 

 

Autour d’eux, dans les maisons assoupies, les draps abandonnés au sommeil sont chauds. Quelques sonneries réveillent les occupants. Les stores se lèvent et des carreaux vibrant de jaune illuminent les jardins et font fuir les limaces. L’assise fraîche des toilettes accueille les premières fesses, les habitants se libèrent des fluides accumulés durant la nuit. Les filtres de papier laissent mollement passer le café ou infuser le thé, tout coule et tout le quartier commence à se doucher. Des tartines. Des jus de fruits. Quelques cachets, des gélules, certains quittent déjà leur domicile. Camille s’éloigne. 

L’enfant tout entier se referme. Il devient lourd de tristesse et de souffrances, sa tête se baisse et s’écrase dans ses épaules, elles s’affaissent, ses bras pendent, incapables de lever les mains pour un ultime salut ou seulement pour essuyer sa tristesse. L’allée de graviers craque sous les pieds de sa mère, c’est le dernier bruit qu’il entendra d’elle. Camille souffle, fort, en sortant de la propriété. Elle souffle ses remords, elle souffle ses pensées, elle serre les poings, la douleur de ses phalanges écorchées s’amplifie. Elle a envie de se retourner, de jeter ses yeux sur l’enfant, alors elle pince son cœur et continue à disparaître, et les premiers pas de sa fuite s’accompagnent des larmes de son fils. 

 

Le monde ignore la vérité des faits, le couple qui retient l’enfant, figé dans l’incompréhension, ne sait rien. Il n’y a pas eu de confession, aucune explication n'a été demandée. Après quelques mots sommaires, il y a seulement le dépôt d'un colis blessé, une livraison de produit inutile, d’un gosse. 

Jérémy a soufflé à Camille de rassembler tout le courage dont elle disposait et de fuir, d'abandonner quelque temps son enfant à des parents, des proches ou des amis de confiance. Il faut qu'elle parte, qu'elle prenne le large pour apaiser ses blessures, pour purger les remords qui commencent à la ronger. Dans une sorte de lucidité rare, Camille sait que son gamin ne peut plus être montré, il faut le cacher pour éviter les jugements, les condamnations, c’est pour cela qu’elle le laisse à ce couple discret. Jérémy la suit. Avant de s'éloigner tout à fait, il jete un dernier coup d'œil au petit, ce môme dont il ne connaît presque rien, et, dans un sourire sans conviction, cherche à lui dire de ne pas s'inquiéter, qu'ils reviendront. Jérémy se déplace sur la pelouse humide, le bruit des graviers le dérange, il a peur d’incommoder le voisinage qui s'éveille à peine. Il traverse les vapeurs matinales de la nature, franchit les rais obliques du soleil qui s’immiscent entre le tronc des arbres jusqu’à rejoindre Camille. Il marche à côté d’elle, sans parler, sans lui tenir la main, sans penser à autre chose qu'au départ. La nuit sans sommeil a vidé leurs forces, quelques dizaines de mètres sont déjà trop d’efforts, une déchirure des muscles, un traumatisme physique. Il ne reste plus d'énergie pour que la tristesse imprègne leurs visages, seulement l'empreinte d'esprits aliénés, perdus dans la succession des pas. 

 

La porte de la maison s’efface doucement, l’enfant n’est plus qu’une silhouette comme les autres silhouettes d’enfant, sans son histoire et sans ses maux. Camille ne se retourne toujours pas. L’allure ralentit machinalement dans l’aveuglement du soleil levant, une hésitation. Revenir, faire demi-tour pour assumer sa folie avec dignité ou partir, digérer son amertume dans l’errance, pour oublier. Ils avancent le long des rues aux noms de fleurs et d’arbres. Le temps les éloigne. Des cartables roses passent à bicyclette sur le dos de jeunes filles, un ballon devance une bande de garçons et les parents pressés restent prudents derrière leur volant. Camille et Jérémy distinguent le son d’une cour de récréation qui commence à chahuter. Ils aperçoivent des familles qui s’embrassent et s’étreignent avant de se quitter. Jérémy remarque que les rues ont maintenant des noms de peintres célèbres, les maisons sont toujours les mêmes, emprisonnées, clôturées dans six cents mètres carrés et l'espoir du bonheur. Camille laisse échapper quelques larmes dans le vent frais, la bouche grande ouverte, la respiration saccadée, nerveuse, jusqu'à ce qu’une toux expulse des postillons. Elle détourne son regard de ces familles heureuses, elle sait qu’un enfant n’ira pas à l’école ce matin, elle baisse la tête en crispant ses mâchoires et continue à avancer. Les minutes sont moins incertaines que leur pas et elles trottent sans qu’ils s’en aperçoivent réellement. 

Un boulevard s’ouvre devant eux. Les réverbères et les phares chuchotent toujours. De grandes affiches vantent des produits de consommation courante avec des femmes presque nues, que Jérémy trouve jolies, et des hommes musclés que Camille ne remarque même pas. Les trottoirs ont disparu. Ils avancent dans les herbes souillées par le dépôt des carburants brûlés. Leurs pieds se mouillent dans la rosée nocturne. Les maisons sont plus éparses, les automobiles plus nombreuses. Les employés et les ouvriers roulent vers la ville, ses bureaux et ses usines. Les vendeurs accélèrent vers un chiffre d'affaires prometteur. Les consommateurs freinent, la zone commerciale n’est plus très loin. Jérémy a froid. Il imagine la rotondité de la terre sous ses pas, il pense à des chaussures plus confortables, peut-être imperméables. Il songe à un coupe-vent. Il n’aurait pas dû oublier ses lunettes de soleil. 

Camille déleste sa colère en pestant contre la photo promotionnelle d’une pâte à tartiner élaborée à partir de chocolat et de noisettes. Le nom est imprimé en rouge et noir, pour la lisibilité du style. Elle crache sur la représentation d’une famille complice avec des enfants lisses et parfaits. Elle crie. C’est le son d’une femme en détresse, étouffée par le remords, c’est inaudible, sourd, et puis, la densité de la circulation est trop importante, ce sont les décibels du diesel qui prévalent. Tout son corps cherche à exorciser sa responsabilité sur les rebuts de la vie routière croisés çà et là. Elle shoote, les canettes d’aluminium vides volent, elle piétine, rageuse, les boîtes de carton ou de polystyrène, elle écrase les d’objets en plastique disséminés comme un rash allergique sur la surface de la terre. Un sac plus grand que les autres, ou mystiquement vengeur, la condamne au ridicule. Il s'emmêle autour de ses pieds et lui fait perdre l’équilibre. Voilà désormais Camille à terre. 

 

Les voitures aux yeux rieurs passent. 

 

Quelques mètres en arrière, Jérémy a suivi la scène en souhaitant, presque désespérément, un café, des chaussettes plus épaisses, une discussion, une chanson, un chemin bucolique, apaisant. Ils ont décidé de partir à pied, peut-être pour cela. À quelques pas devant lui, la danse d’une possédée se mariait à la rude symphonie des moteurs à explosion. Camille jouait le ballet de l’énervée, ses membres cisaillaient le ciel en tous sens, désordonnés comme à la saint-guy. Ses râles étranges l'amusaient, il trouvait ça cocasse. En un instant, l’équilibre incertain de la femme s‘est rompu. Le déchet plastique. La chute. Jérémy n’a pas ri. Il sait que chaque gadin à des conséquences, hématomes et humiliation. Camille promène déjà assez de honte, alors il n’a pas souri, pas encore et pas pour cela. 

 

Camille reste quelques secondes au sol, à genoux, dans la position de la pieuse en prière. Elle lève les yeux au ciel, elle implore, elle cherche l’aide et le réconfort de l’être suprême, mais, là-haut, seul un petit nuage se manifeste à sa vue et il n’en a rien à foutre. La main tendue est celle de Jérémy, elle doit la saisir et accepter qu’il soit, peut-être pour plusieurs mois, son unique assistance. Elle n’aime pas qu’on la soutienne, être une charge, c’est une femme indignée depuis tant d’années qu’elle ne s’appuie que sur elle-même. L’horizon devient alors un point de fuite idéal pour éviter de croiser le regard de Jérémy, pour l’écarter. Elle plonge dans ce lointain qui semble inaccessible, farouche, les yeux presque fermés. Elle se relève, seule, elle repart avec une foulée furieuse dans les herbes aussi sales que sa vie, brunes, grasses, lourdes, puantes. Jérémy la suit, il sourit, il offre à Camille une humeur de réconfort, elle ne la verra jamais. Il conserve l’espoir qu’elle se retourne, accroché à la bouche, un rictus un peu benêt, énigmatique, affiché en pleine face. Sourit-il aux oiseaux qui volent, au vent, aux moucherons, au petit bois qu’il croise ou au joli petit cul qui s'égare devant lui? Les voitures crient et klaxonnent sur leurs semblables, de temps en temps se moquent des piétons. 

Les nuages sont curieux, voire malicieux. Ils s'amoncellent discrètement et s’amusent du couple las qui déambule. Le boulevard s’élargit d’une voie supplémentaire à l’approche d’un carrefour routier. Camille et Jérémy longent une petite aire de stationnement pour automobiles située sur leur droite. Elle sent la baguette. Un bâtiment exhibe un joli contraste de couleurs évoquant la tradition et le haut de gamme, du noir et un orangé vintage. Les vitres sont impeccables, elles offrent à la vue des passants, un comptoir avec des étalages appétissants de pâtisseries, de sandwichs, de viennoiseries. Les pains sont présentés sur des étagères hautes, certains dans des paniers d’osier. L’osier tressé se retrouve également dans les luminaires au-dessus des tables de bois clair et des chaises en plastique moulé vert bio. Jérémy s'arrête. Il hésite, refait deux pas et suspend de nouveau sa progression. Un dilemme l'empêche d’avancer. Le temps s’écoule dans le cheminement de ses doutes, boulangerie ou pas boulangerie. Camille se sauve. 

 

La maison est calme. L'enfant est assis sur le canapé. Le chocolat chaud posé sur la table basse embaume encore le salon. Il a faim de sa mère, pas des tartines beurrées à côté du bol. Il désire son odeur, pas celle des nuits de bouteilles et des excès de vie, celle de la sortie de l’école, l’odeur de l’eau de javel et de la sueur sous les bras, du chiffon sale et de la poussière. Il veut retrouver la chaleur de sa main sur le chemin de l’école, pas celle de son poing. Il rêve de se blottir dans ses bras, de trouver le réconfort de l’intime, de la femme de sa vie. Il veut la voir. L’enfant glisse du canapé sur les douleurs de son corps et de son esprit. Il ressemble à une dépouille qui n’a plus de sens. L’enfant se ferme. Il attend, retiré des yeux du monde. 

 

Convaincre Camille de se sevrer momentanément de son obstination à avancer n’a pas été aisé pour Jérémy. Il l’a appelée plusieurs fois, avec tendresse, à l'impératif, en argumentant, jamais en implorant. Camille cède. Ils sont maintenant assis dans la boulangerie. Elle commande un café, Jérémy aussi, un double avec deux croissants. Elle souffle sur les buées torréfiées de sa boisson chaude. Jérémy la regarde. 

 

Le couple hospitalier se sépare pour la journée, plus tard que d’habitude. Alain prévient qu’il rapportera le pain ce soir. Solange souligne ses yeux de crayon noir. L’enfant se tait.

Ce que nous enseignent les enseignes

Les rouges vivent en feu, les bleus bataillent et les jaunes explosent. Des éclats de vert parsèment le faubourg, il paraît une guerre. Du lointain de cinq ronds-points, sous un ciel lourd, Jérémy contemple les enseignes et trouve amusant de penser cette augmentation du réel. Sa vision de la zone périurbaine est apocalyptique, ce sont des flashs hystériques, des affrontements intergalactiques, des combats d’arcade. Dans le monde banal, les murs de tôles clignotent de la couleur vive des lettres de néon et le reflet des logotypes fluorescents habille les anonymes des lumières du désir. 
Camille et Jérémy s'approchent du centre commercial. L’espace est un temps qui s’étire sous les pas au-delà des prévisions, des suppositions. Ils semblent arrivés, mais ils doivent encore marcher, franchir un nouveau disque giratoire. La végétation est encore sous leurs semelles, mais des bordures de béton naissent à l’approche des centres urbains et préservent la chaussée des cailloux, de la terre, des vers et des champignons, puis, le confort du trottoir de macadam recouvre tout cela. En cette fin de matinée, des files mécaniques ininterrompues montent vers la ville, tant et tant que parfois les pieds deviennent plus rapides que les roues. Jérémy bombe le torse, fier de dépasser les engins motorisés avec le simple entêtement de mettre une jambe devant l’autre. Il loue les saints des livreurs et des joggeurs d’éprouver l’euphorie de la rue. Il s’occupe l’esprit avec cette fierté futile alors que Camille se tait, s'isole, prémédite des actes fous. Les minutes meurent dans le paysage du consumérisme. L’aménagement du territoire facilite l’accès aux achats de masse, autour d’eux sont édifiés un arrêt pour autobus, le premier de la journée, des réverbères récents, des buissons séparateurs de voies et des parterres de fleurs, des parkings et des parkings. Jérémy est heureux d'arriver sur le lieu de leur première halte. Ils vont s’équiper pour leur lointaine destinée.
Camille a depuis longtemps déserté ses résolutions de bien-être, son regard traîne sur ses vieilles baskets usées. Elles n’éxhibent pas de virgules, de triples bandes, de crocodiles ou de félins, juste les craquelures dégueulasses du cuir peint, lézardé par la tectonique des ans. Des spasmes de colère serrent sa mâchoire jusqu’aux crampes. Pas la colère des jaloux ou des envieux, mais la colère de ceux qui sont obligés de baisser les yeux, la colère des injustices et des privations, celle des âmes brisées. Camille file Jérémy, elle sait qu’elle doit le suivre. Ils passent devant le magasin pour les acheteurs à chariot. Elle le connaît, en septembre dernier, elle se trouvait à cet endroit, là, sa liste de fournitures pour les élèves de cours élémentaire première année pliée dans sa poche. Le jean qu'elle porte vient d'ici et le polaire aussi, c’est chaud, c’est bon marché, mais ce n’est pas beau. Camille n’a plus envie d’avoir le goût de plaire. Camille cherche dans son passé et se questionne sans trouver de réponse. Quel est le nom du superhéros qui arbore un bouclier décoré d’une étoile? Celui qui orne les cahiers et la trousse de son fils, l'enfant qui n’ira pas à l’école aujourd’hui. Elle repense à cette douce euphorie d’avoir déniché tous ces articles pour la rentrée scolaire. C’est exactement ce qu'il désirait, elle le croyait, elle croit encore. L’enfant n’a pas souri et ils n’ont jamais évoqué ce sujet lorsqu’elle est rentrée des commissions, lors des repas de famille ou des départs à l’école, ils se parlent rarement, elle ordonne souvent. Le nom du héros ne lui revient pas en tête, elle aurait bien demandé la réponse à Jérémy, mais elle est fatiguée de la bouche à force de mordre ses dents. Elle se tait. Elle avance en zigzaguant autour des véhicules avides de sacs et de paquets. Le parc de stationnement est immense, l'indexation des allées égrène l’alphabet jusqu’à “P”. Camille et Jérémy le traversent et patientent devant un petit bonhomme de diodes électroluminescentes rouges. L’avenue qu’ils vont croiser porte le nom d’un illustre militaire, cela est fréquent sur les grandes artères des peuples qui s’entretuent. Les diodes sont devenues vertes. Un trottoir à descendre. Des bandes blanches prévues pour la circulation pédestre. Un nouveau trottoir. Ils bifurquent vers la droite, passent un bâtiment proposant des repas rapides de sandwichs chauds et empruntent un parking plus modeste, mais pas moins humble, il y a de jeunes arbres, rectilignes et identiques, des totems de verdure engoncés dans un cube de terre à mégots. 

Des portes automatiques en verre, à double vantail, s’ouvrent.

Tout est à sa place, tout est comme cela doit être. Les portiques contre les resquilleurs montent la garde, le vigile est en costume de vigile et les employés sont en t-shirt d’employés. Les caisses sont parfaitement alignées et, derrière elles, des rayonnages de vêtements, de chaussures et d’articles divers de sports et de loisirs. La douce mélopée d'une bossa brésilienne baigne l’atmosphère de joies et d’humeurs guillerettes, les éclairages suspendus chassent l’ombre et la morosité, les senteurs de coton amidonné, de cuir neuf et de nylon sec tourbillonnent... à suivre.

Chapitres

Ainsi soit l'exil  
Ce que nous enseignent les enseignes 
Le premier tremblement 
Marcher avec les souvenirs 
Turbulences 
Les jours de silence  
La fatigue du vin  
L’épisode du train bleu et autres anecdotes  
L’alibi de l’émerveillement
Une intense bousculade
L’effroyable bruit du gland  
La confusion des jours douillets 
L’amère sucre de la joie  
Les aimants n’ont pas besoin de cela 
Tenir la promesse    
Trois scènes de vie passées 
Le corps est le châtiment 
Le rocher de la folle 
La dernière marche
Là-bas! Où il fallait aller
L’enfant qui désirait être celui de sa mère

Ce roman n'est pas encore édité. 

bottom of page